Le 16/06/2023
Mettre un terme à la concurrence sur le marché des énergies pour imposer le retour des tarifs réglementés de vente d’EDF à tous les usagers ? C’est en tout cas la proposition de l’association nationale de consommateurs et usagers (CLCV).
2025 marque la fin de la période transitoire d’ouverture du marché de l’électricité à la concurrence. Cependant, depuis ces 15 dernières années, aucun des acteurs concernés n’a été satisfait par ce système. Qu’il s’agisse du fournisseur EDF, dont le gouvernement détient encore 84% et qui vend des tarifs réglementés, ou des autres opérateurs qui commercialisent une part de la production nucléaire d’EDF avec des offres de marché à des prix supposément bénéfiques aux consommateurs.
L’arrivée de la concurrence sur le marché n’a pas permis aux particuliers de faire les économies souhaitées. Des conclusions qui ne satisfassent personne, en particulier la Commission européenne. Cette dernière s’est engagée dans des négociations intenses avec l’État français pour mettre fin à cette crise.
Un plaidoyer en faveur d’un retour total aux tarifs régulés et à la fin de la concurrence sur le marché de l’électricité à été publié la semaine dernière par la CLVC. « Ouvrir le marché de l’électricité à la concurrence n’a fait que porter préjudice aux clients. Il est de notre devoir d’apporter une solution concrète avant 2025 », explique François Carlier, directeur général de la structure. Malgré cette libéralisation, 2/3 des foyers sont encore aujourd’hui abonnés au tarif bleu d’EDF.
L’Arenh ( dispositif permettant aux fournisseurs d’électricité concurrents d’EDF de lui racheter une partie de sa production nucléaire à bas prix) va bientôt prendre fin. L’association de consommateurs et usagers demande à reconsidérer ce dispositif.
« 18 ans après l’ouverture du marché, les opérateurs doivent cesser d’utiliser ces dispositifs qui font non seulement augmenter les prix mais découragent l’innovation», affirme l’association de consommateurs. Cette dernière estime qu’un retour aux tarifs réglementés d’EDF pour tous est propre au marché de l’électricité. Ce marché étant spécifique, un retour aux tarifs réglementés d’EDF est nécessaire à contrario des télécoms où l’ouverture du marché à la concurrence a été bénéfique aux consommateurs.
« L’unique moyen pour les opérateurs alternatifs de se différencier en terme de prix et de qualité est de pratiquer une concurrence déloyale. Conséquence de la libéralisation du marché de l’électricité : des pratiques commerciales trompeuses et agressives », dévoile l’association. En 2018, 17000 consommateurs ont saisi le Médiateur national de l’énergie. L’entreprise EDF pourrait aussi avoir sa part de responsabilités: D’après Plüm énergie qui a étudié le phénomène, le fournisseur n’indique pas aux clients les offres avantageuses. A savoir que l’option Heures pleines/heures creuses n’est plus l’offre la plus avantageuse mais qu’il s’agit de l’option Base dans 85% des cas.
La proposition de l »association nationale de consommateurs et usagers pourrait bien être mentionné durant la prochaine campagne présidentielle avec le projet de réforme d’EDF. Cependant tous les acteurs n’y sont pas favorables.
Concurrence ou tarifs réglementés ? « La concurrence permet de changer de fournisseur facilement, même pour un faible bénéfice. En situation de monopole,
l’entreprise dominante a moins de pression, impactant négativement la qualité et le prix du service », appréhende un fin observateur du secteur, en désaccord avec la CLCV.
«Nous avons mis en place un modèle économique qui ne fonctionne pas et nous faisons semblant de le regretter maintenant », dénonce Vincent Maillard, co-fondateur et président de Plüm énergie. Cependant, un « retour au monopole n’est pas la solution car nous resterions dans un modèle inefficace ». Il nous faut une politique énergétique limpide – part de l’innovation, du renouvelable ou du nucléaire, – qui puisse stabiliser un marché encore trop instable ».
« EDF exploite des centrales nucléaires et organise, par RTE et Enedis, la distribution de l’énergie aux différents fournisseurs. Une bonne concurrence n’est donc pas possible », souligne François Carlier. Enfin, selon le directeur général de l’association CLCV « En décidant à l’avance du partage de l’électricité, la France ne respecte pas les traités européens. Le traité de Rome mentionne la libre concurrence. La France s’appuie sur un modèle anticoncurrentiel, un accord préalable, afin de créer la concurrence. »
« L’Arenh est un dispositif qui fonctionne bien, mais ses paramètres ne sont plus adaptées à la situation actuelle », avoue la CRE (Commission de régulation de l’énergie) au média MoneyVox. On espère que les négociations entre la Commission européenne et le gouvernement français concernant la restructuration d’EDF aboutiront rapidement, afin d’améliorer le système. (…) En ouvrant le marché de l’électricité, la France s’est engagé. La proposition énoncé par l’association nationale de consommateurs et usagers est irréaliste » souligne la CRE.
Le gendarme de l’énergie a par ailleurs recommandé de changer les paramètres de l’Arenh. L’entreprise EDF pourrait revendre son électricité aux différents opérateurs 48€ du MWh contre 42€ à l’heure actuelle. Ainsi, un opérateur faisant face à des difficultés financières importantes pourra rentrer dans ses frais. Reste à voir si Bruxelles acceptera cette augmentation. Si cette hausse est validée, il s’agira d’une difficulté supplémentaire pour les autres fournisseurs dont 75% de l’approvisionnement en électricité se fait grâce au dispositif de l’Arenh.
En vertu de la loi énergie-climat, le Parlement français a accordé aux opérateurs alternatifs une augmentation du plafond de l’Arenh pour vendre 150 TWh d’électricité provenant d’EDF contre 100 jusqu’à maintenant. Cependant, les négociations avec Bruxelles n’ayant toujours pas abouties, cette décision n’a pas encore été mise en pratique. La guerre des prix sur l’électricité ne fait que commencer.
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